Conflits environnementaux : plus de gouvernance, moins de démocratie
par Léa Sébastien
Résumé :
La « démocratie environnementale », entendue comme le droit de participer aux décisions en matière environnementale, a été instituée via la Convention internationale d’Aarhus en 1998 puis via la Charte de l’environnement en France en 2005. Depuis, l’État a mis en place des processus participatifs à toutes les échelles pour accompagner sa politique de transition écologique. Pourtant, dans le même temps, les conflits environnementaux et d’aménagement ont explosé sur tous les territoires et les désastres écologiques s’accélèrent. Cet article explore ce paradoxe et montre que la participation institutionnelle répond à un modèle de gouvernance et non de démocratie, une nuance importante. Car si la démocratie environnementale vise à ouvrir les processus décisionnels à une multitude d’acteurs, la gouvernance maintient le pouvoir aux mains des acteurs forts, n’interroge pas la notion d’intérêt général, nie les conflits, dépolitise les enjeux environnementaux. Cette absence d’espaces de négociation entre acteurs pour décider collectivement est préoccupante dans la perspective des crises climatiques, de sécheresses, etc. Les outils de la démocratie environnementale doivent s’étoffer et permettre de tenir compte des intérêts des humains et non humains, du statut de bien commun de l’environnement, des asymétries de pouvoirs et de savoirs, des dimensions affectives locales.
Abstract : Rise of environnemental conflicts : more gouvernance, less democracy
“Environmental democracy”, understood as the right to participate in environmental decisions, was established by the Aarhus International Convention in 1998 then by the Environmental Charter in France in 2005. Since then, the State has implemented participatory processes at all scales to support its ecological transition policy. However, at the same time, environmental and planning conflicts have exploded in all territories and ecological disasters are accelerating. This article explores this paradox and shows that institutional participation responds to a model of governance and not of democracy, an important nuance. Because if environmental democracy aims to open decision-making processes to a multitude of actors, governance maintains power in the hands of strong actors, does not question the notion of general interest, denies conflicts, depoliticizes environmental issues. This lack of spaces for negotiation between actors to decide collectively is worrying in the perspective of climate crises, droughts, etc. The tools of environmental democracy must be expanded and make it possible to take into account the interests of humans and non humans, the status of the environment as a common good, the asymmetries of power and knowledge, the local affective dimensions.
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