Au cours de l’année 2007, les relations de la Russie avec les États-Unis, l’OTAN et l’Europe ont connu une détérioration spectaculaire autour d’une série de dossiers aussi importants pour la sécurité européenne que l’installation d’éléments de la Missile Defense américaine en Europe centrale, l’avenir des traités sur les forces conventionnelles en Europe (FCE) et sur les forces nucléaires intermédiaires (FNI [1]), le statut du Kosovo et la réforme de l’OSCE. Au-delà de la volonté naturelle de Moscou de défendre ses intérêts propres, cette dégradation est aussi le fait d’une diplomatie russe formatée par quatre facteurs que sont les visées économiques de sa politique, une vision impériale des relations internationales (rapports de force et recherche de puissance), un complexe obsidional manipulé à des fins électorales, un régime politique autoritaire. Cette accumulation de tensions, aux accents de guerre froide, remet sur le devant de la scène européenne une « question russe » que l’on croyait dépassée, renforçant sur le continent l’influence américaine, redonnant une nouvelle importance à l’OTAN et affaiblissant, par contrecoup, le projet européen. La politique russe d’obstruction systématique et de refus tactique de la coopération mise au service d’intérêts stratégiques immédiats, non seulement ne contribue pas au règlement des problèmes, mais, au contraire, risque de les perpétuer, voire de les aggraver. Loin d’affermir la stature internationale du pays, elle est surtout génératrice d’images de puissance plutôt que de puissance réelle. Elle va aussi à l’encontre du but recherché au sens où elle tend à braquer contre la Russie l’ensemble, ou peu s’en faut, de ses voisins et à les pousser à développer en commun des synergies pour contrer son influence. Non seulement cette politique ne peut pallier la réalité - trop forte dépendance des exportations d’énergie, attrition rapide des armements, économie fragile -, mais encore contribue-t-elle, derrière les apparences, à miner encore cette réalité.

Abstract : Russia and NATO’s growing importance in Europe

During the year 2007, Russia’s relations with the United States, NATO and Europe have experienced a dramatic deterioration about a series of issues which are as much important for European security as the deployment of elements of the US Missile Defense in Central Europe, the future of the treaty on the Conventional Armed Forces in Europe (CFE) and the Intermediate- Range Nuclear Forces (INF) Treaty, the status of Kosovo and the reform of the OSCE. Beyond the natural desire of Moscow to defend its own interests, this degradation is the result of a Russian diplomacy formatted by four factors that are : an « economization » of the policy, an imperial vision of international relations (power relations, research of power), an obsidional complex manipulated for electoral purposes, an authoritarian political regime. This accumulation of tensions, with a Cold War hint, puts again on the European scene the « Russian question » that we thought definitively belonged to the past, strengthening the American influence on the continent, giving new importance to NATO and weakening, in turn, the European project. The Russian policy made of systematic obstruction and of tactical denial of co-operation in order to serve immediate strategic interests not only does not contribute to solve the problems but, on the contrary, could perpetuate and even aggravate them. Far from strengthening the country’s international stature, it is mainly generating images of power rather than real power. It also reveals itself as counterproductive as it tends to focus on Russia the animosity of nearly all of its neighbours and to encourage them to jointly develop political synergies to counter its influence. Not only this policy cannot change Russian reality (too heavy dependence on energy exports, rapid attrition of armaments, weak economy), but also contributes beyond appearances to undermine even more this reality.


[1Ce traité, signé en 1987 par la Russie et les États-Unis, porte sur l’élimination complète des missiles sol-sol d’une portée comprise entre 500 et 5 500 km. C’est dans le cadre de ce traité que sont, par exemple, détruits les fameux SS-20 et autres Pershing II. C’est un texte historique au sens où il a ouvert la voie au traité stratégique START et à son régime de vérification contraignant selon le principe des inspections sur site.

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